Un enjeu crucial


Abondamment commenté dans les médias, un sondage mené par Gallup sur la motivation des salariés a fait grand bruit : à l’en croire, seuls 6 % des employés français s’affirment engagés au travail (State of the global workplace, Gallup, 2017). Ce taux étonnant en ferait donc les salariés les moins motivés d’Europe ! Toutes sortes d’arguments, tels que les particularités culturelles, un chômage élevé, ou encore un management paternaliste, ont été avancés par des spécialistes en ressources humaines afin de cerner l’origine de ce « mal français ». Attention toutefois, ces chiffres sont à prendre avec des pincettes, d’autres cabinets de conseil ont obtenu de résultats bien supérieurs. Si des différences de méthodologie peuvent expliquer ses écarts, la multiplicité des études ou des réflexions sur le sujet démontre bien que la motivation, l’implication et l’engagement des salariés revêtent une importance capitale. Avec le recrutement et la conduite du changement, la motivation des salariés figure donc en tête des préoccupations des managers. Comment ces derniers, conscients de la force motrice de la motivation pour leurs équipes, peuvent-ils l’améliorer ? Voici quelques pistes…


Tirer les leçons des stratégies de motivation décevantes


Conscientes de l’impact déterminant de la motivation sur la performance, les entreprises se sont depuis longtemps efforcées de développer de multiples stratégies de motivation. Viennent aisément à l’esprit les systèmes déjà éprouvés de primes à la performance, meilleur employé du mois, intéressement aux résultats de l’entreprise, etc. qui se sont multipliés ces dernières décennies. Sans pour autant embrasser totalement les méthodes participatives quelque peu douteuses du Loup de Wall-Street, l’idée d’être récompensé ou de gagner plus en fonction du chiffre d’affaire est parfaitement attrayante. Après tout, la gratification, qu’elle soit matérielle ou non est toujours satisfaisante. Pourtant, on se rend compte que ces stratégies n’ont produit que des résultats souvent décevants sur la durée. On peut ainsi partir du principe que si elles ne doivent pas être forcément remises en cause, le rôle du manager peut être d’y apporter des améliorations concrètes et ce de façon quotidienne.


Autodiagnostic du manager : une étape nécessaire


Mais d’ailleurs, que fait-il au juste le manager ? Le manager fait du management. Et le management, alors, qu’est-ce donc ? Ce que fait le manager ! Faisons donc appel à l’étymologie pour y voir plus clair. Tout questionnement sur le manager nécessite une interrogation préalable, même succincte, sur le management. Le terme management a probablement la même racine latine que ménagement, mot français du XVIe siècle, dérivé de ménager qui signifie disposer, régler avec soin et adresse selon le Petit Robert. Son étymologie est plus claire que sa signification actuelle car le terme est tellement galvaudé qu’on oublie l’essentiel : le management est une fonction qui vise à transformer du travail en performance. Nous en avons tous fait l’expérience, si on peut difficilement être performant sans travailler, on peut très bien travailler, même beaucoup, sans être performant. Le manager orchestre et favorise cet effort collaboratif qui conduit à la performance.

Et la performance d’une équipe se mesure souvent à son implication. Un manager, pour apprendre à faire faire et impliquer son collaborateur, doit souvent commencer par désapprendre à faire. Cela nécessite parfois de changer ses habitudes, mais aussi, et peut-être surtout, d’être au clair avec son ego. Un bon manager est donc quelqu’un qui n’hésite pas à recruter des personnes « meilleures » que lui. Cela exige une confiance en soi suffisante pour ne pas se sentir menacé par quelqu’un qui possède des compétences qu’on n’a pas. Ainsi, si le manager connaît et assume sa posture grâce à une réflexion personnelle (et parfois un changement), le rapport de confiance qu’il sera en mesure d’instaurer avec ses collaborateurs ouvre la voie d’une implication et donc d’une motivation pérenne.


S’adapter pour motiver : un acte de communication managériale


La motivation est un enjeu essentiel pour les managers, qui ont également leur propre motivation à gérer. Nous l’avons vu la compréhension de leurs propres forces, à la mise à profit de celles-ci et au développement de leur propre style de leadership : c’est ce cheminement qui permet aux managers de travailler à la motivation des équipes. Une fois celui-ci entamé, il doit maintenant prendre l’autre en compte et savoir le lui exprimer (pas de manager sans équipe !). Aussi évident que cela puisse paraître, il faut savoir que motiver passe souvent par la communication qu’elle soit verbale ou non verbale. Ainsi, maîtriser une communication motivationnelle et adapter son management à la personnalité de ses collaborateurs devient indispensable pour maintenir une motivation durable. Motiver c’est aussi adopter la bonne posture managériale : un management adaptatif, exemplaire et sincère.


Donner du sens à ce que l’on fait (et donc ce que l’on fait faire) : la clef de la motivation


On a pu critiquer les systèmes reposant sur une motivation « externe », c’est-à-dire sur la promesse de récompenses en échange d’un résultat. De fait, dans un contexte où l’on demande à chacun de dépasser un simple rôle d’exécution de tâches, où la mesure de la performance est de moins en moins objective, une telle approche se révèle souvent inadéquate. Les réflexions des experts en ressources humaines et les contributions des différents formateurs ou chercheurs sur le monde du travail se concentrent désormais davantage sur la recherche du développement d’une motivation « interne » : c’est-à-dire rendre le travail motivant par lui-même et redonner du sens aux différents rôles et aux missions accomplies. L’idée n’est pas de créer une dichotomie entre passion qui ne se contente que de peu et volonté de rémunération qui se satisfait d’une série de tâches accomplies sans intérêt. Au contraire, pour motiver ses collaborateurs, l’on part du principe que les prérequis d’une rémunération à leur juste valeur et des conditions de travail agréables (sinon acceptables) soient remplies.

La motivation est complexe, varie d’un individu à un autre et évolue dans le temps. En effet, nous ne sommes pas tous motivés par la même chose ni n’avons la même motivation au début de notre carrière professionnelle qu’à l’approche de la retraite. Cependant, donner un sens à notre travail, et ce à n’importe quel âge, pour parvenir à un certain sentiment de réalisation impacte fortement sur la motivation. Le rôle du manager est décisif en ce sens, il peut contribuer à ce que ses collaborateurs aient la satisfaction d’accomplir quelque chose par leur travail, ne serait-ce que par le fait d’acquérir de nouvelles compétences, ou relever des défis…


Faire place à l’innovation pour améliorer la force motrice de la motivation


Quand on parle d'innovation, on pense en premier lieu aux innovations technologiques ou à la création de nouvelles offres. Pourtant l’innovation managériale n’est pas en reste. Aujourd’hui définir des objectifs clairs et précis à la place d’une série de missions absconses, faire preuve de reconnaissance et faire régulièrement des feedbacks constructifs, confier des responsabilités et pas seulement des tâches à accomplir sont des notions connues et qui font leurs preuves. Pourtant il y a quelques années encore laisser un collaborateur être autonome (ne parlons pas de télétravail !) état encore synonyme d’inefficacité. Faire place à l’innovation, c’est aussi savoir remettre en question ses certitudes, s’intéresser à ce qu’il se fait ailleurs, s’interroger pour permettre de favoriser le bien-être au travail et de booster la motivation de ses équipes.

Alors chers managers, partants ?


[Article écrit par Pauline Grousset pour Happiness Work]